Style

17 janvier 2017

Louis XIV, « l’inventeur » de la haute joaillerie française

Sous son règne, de 1643 à 1715, Louis XIV réunit toutes les conditions pour faire de Paris la capitale de la haute joaillerie.

 

Une passion adamantine

Le souverain n’est pas seulement passionné de jardins et de danse : il raffole du diamant auquel il va donner une place prééminente, au détriment de la perle alors objet de tous les désirs. Cette passion, attisée par le legs du cardinal Mazarin consistant en 18 diamants exceptionnels, lui permet d’affirmer sa suprématie et son pouvoir. Il l’intègre à son costume : il la porte en boutons, sur son chapeau, sur son épée, en boucles de souliers ou en boutonnières, en ganse sur le revers des poches ou sur la couture du dos de la redingote. Pour impressionner l’ambassadeur de Turquie, il se fait même faire un habit entièrement brodé de diamants blancs.

 

Le premier négociant en pierres

Cette passion est nourrie par Jean-Baptiste Tavernier. Entre 1631 et 1668, celui que l’on considère comme l’ancêtre des négociants en pierres précieuses fait six voyages pendant lesquels il parcourt 240 000 kilomètres. Il s’aventure en Turquie ou en Perse. Dans une Inde infestée de tigres, il est le premier européen à accéder aux fameuses mines de diamants de la vallée de Golconde. Il rapporte des pierres exceptionnelles dont le fameux diamant bleu-violet de 115 carats, à l’histoire rocambolesque. Personnage central dans l’histoire du diamant, Jean-Baptiste Tavernier fait actuellement l’objet d’une thèse financée par l’École des Arts Joailliers et dont les avancées seront présentées par cette dernière, lors d’une conférence le 2 mars 2017.

 

Le progrès dans l’art de la taille

En 1550, on compte à Paris 300 ateliers d’orfèvres qui excellent dans l’art de la monture tandis que les meilleurs lapidaires se trouvent en Hollande. Mais pour Louis XIV qui veut avant tout mettre en valeur le diamant, les Français progressent et se dépassent dans l’art de la taille multipliant les facettes permettant d’augmenter l’éclat. Ils posent les bases de la taille brillant, encore la plus connue aujourd’hui. Pierre Le Tessier de Montarsy, Sylvestre Bosc, Pierre Blain : tous les artisans sont dévoués à la passion du Roi Soleil et vont faire de Paris, pendant la seconde moitié du XVIIe, la ville de la haute joaillerie.

 

Une clientèle à la mode de Louis XIV

Louis XIV déclenche un engouement phénoménal : l’aristocratie se jette à corps perdu dans le diamant au point de transformer Versailles en un théâtre éclatant. Les coiffures brillent sous les feux des chandeliers et se reflètent dans les miroirs. Les diamants sont brodés sur les devants du corsage, ils retiennent les manches et se portent en écharpe sur les manteaux de brocart. « Paradoxalement, les portraits de l’époque montrent peu cette flamboyance qui en revanche se trouve décrite dans les textes comme les mémoires de La Palatine », explique Gislain Aucremanne, historien de l’École des Arts Joailliers. L’une des représentations les plus connues est celle de Marie Leszczynska dont le devant de corsage rutile sous les broderies adamantines.

 

Les Joyaux de la Couronne

Pendant son règne, Louis XIV enrichit considérablement cette collection initiée par François Ier et qui appartient à l’État. Le Roi Soleil en fait la plus somptueuse d’Occident : en 1691, elle compte 5 885 diamants contre 1 500 autres pierres et 500 perles. Y figurent les 18 diamants hérités de Mazarin (dont le « Sancy » de 55 carats) ou des diamants de couleur dont il raffole. Le « Bleu de France » serti sur la Toison d’Or et érigé en symbole de son règne (aujourd’hui exposé à la Smithsonian Institution) côtoie l’« Hortensia » d’un rose légèrement pêche. En 1714, dans un royaume considérablement appauvri, Louis XIV se verra finalement contraint de refuser une ultime pierre exceptionnelle acquise quelques années plus tard par le Régent, qui lui donne son nom.

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