Style

08 juillet 2022

Qui est Anna Hu ?

Si je devais retenir un bijou pour définir le travail de la créatrice Anna Hu, ça serait une de ses toutes nouvelles pièces : Metamorphosis. Ce large bracelet témoigne de son histoire, de ses inspirations, de ses aspirations et de ses ambitions.

Par Sandrine Merle.

 

 

Véritable feu d’artifice de pierres de couleurs, « Metamorphosis » est une métaphore, celle de la chrysalide aux éclats dorés se transformant en un magnifique papillon prenant son envol. « Mon nom, Hu, veut dire papillon en chinois », explique la quadragénaire en robe de dentelle blanche. Ce bracelet symbolise aussi le renouveau, le passage de l’ombre à la lumière… C’est ce qu’elle a réussi à faire : alors qu’elle célèbre les 15 ans de sa marque, l’un de ses bijoux vient d’entrer au Musée des Arts déco et elle a été invitée à exposer ses pièces à la TEFAF Maastricht. Ce papillon, épreuve reine en haute joaillerie, témoigne aussi de sa volonté de fer pour faire partie des plus grands, de ceux qui excellent dans ce registre comme René Lalique ou Van Cleef & Arpels (chez qui elle a d’ailleurs travaillé un temps). Mais pas de fausse modestie chez Anna Hu : elle est sûre d’en faire déjà partie.

 

Les pierres, des pierres

Le bracelet « Metamorphis » illustre très bien son style très chargé et très empierré. Amateurs de bijoux classiques, graphiques ou tout or, passez votre chemin. « Les pierres font partie de mon ADN, je passais des heures à les observer avec mon père, négociant. Ma mère était, elle, experte en jade et perles. » Sur « Metamorphosis », le feu d’artifice chromatique est composé de 1026 pierres, de saphirs, de spinelles, de tourmalines, de grenats, de diamants dans d’infinies nuances de rouge, de vert, de bleu lagon, de jaune. Elles se juxtaposent et se superposent grâce à la dextérité des artisans exclusivement français. Au centre, le spectaculaire diamant light brown taille marquise de 35,40 carats vient de la maison Moussaïeff, grand spécialiste des diamants de couleur. « J’ai tissé des liens très étroits avec Madame Moussaïeff, c’est la seule personne que je peux appeler le week-end pour parler pierres », s’amuse Anna Hu.

 

Des références constantes à l’art 

« Metamorphis » se réfère à la mélodie « Ah, vous dirai-je, maman » popularisée par les 12 variations pour piano de Mozart. Violoncelliste de haut niveau forcée de stopper net sa carrière à l’âge de 20 ans à cause d’une tendinite, Anna Hu reste obsédée par la musique : dans chaque pierre, elle voit un do, un ré, un mi, etc. Egalement grande amatrice d’art, elle se réfère beaucoup à la peinture comme en témoignent le collier Monet (sa première pièce aussi souple qu’un textile présentée en 2017 à la Biennale de Paris), la broche Da Vinci, la parure Kandinsky, etc. Pour la broche « Enchanted Lilly », elle s’est inspirée des Auratum Lilies du peintre George Walter Dawson, pour sa bague « Lotus » des représentations du peintre chinois contemporain Zhang Daqian.

 

Collectionneuse ?

« J’ai des goûts bien au-dessus de mes moyens », assure celle qui compte quand même dans sa collection un Miro, deux « petits Picasso » et un Chagall ! « De toutes façons, continue-t-elle je peux profiter des plus belles peintures au monde car j’ai la chance d’habiter juste au-dessus du MOMA. » À la TEFAF, elle vient de découvrir Pierre-Joseph Redouté, ce peintre français célèbre pour ses aquarelles de fleurs et dont elle rêve d’acquérir un album. « En le feuilletant, j’y ai retrouvé toute mes inspirations dont les arums avec leurs pétales rouges et blanches. Quel choc ! »

 

Aujourd’hui, Anna Hu fait partie des grands… Une de ses pièces vient d’entrer dans la collection de la Galerie des Bijoux du Musée des Arts décoratifs. En 2013, sa broche « Côte d’Azur » a été adjugée 4,57 millions de dollars chez Christie’s Genève battant deux records mondiaux aux enchères pour une pièce d’un artiste joaillier contemporain (détenu par JAR) et pour le prix le plus élevé par carat pour un saphir birman. Pour ses bijoux présentés à la TEFAF, comptez 500 000 euros pour une bague « Lotus », à minima 1 million d’euros pour un collier ou un bracelet.

 

Article relatif à ce sujet :

Un bijou d’Anna Hu au musée des Arts décoratifs 

Articles les plus lus

Sculptures faciales, extension du domaine du bijou 

Bijou ? Sculpture ? Masque ? Accessoire de mode ? Portable ou pas portable ? Pour les créateurs, ces questionnements n’ont pas lieu d’être.

5 bijoux d'avant-garde à s'offrir quand on aime le Japon

Réalisés dans des matières non précieuses et ne se référant pas au passé, ces 5 bijoux d’avant-garde constituent un espace où les créateurs...

Ce qu’il faut retenir de la Jewelry Week – Paris, Juin 2024

La CAO (Création assistée par ordinateur) : un sujet encore tabou dans ce secteur associé au travail fait à la main par des artisans héritiers d’une...

Avec Tomohiro Sadakiyo chez Hum, à Tokyo

Le côté japonais de Hum, c’est le travail sur la couleur des métaux et sur les textures.

René Boivin, le mystère du bracelet "Torque"

Thomas Torroni-Levene le gardien du temple de la maison René Boivin, a voulu retracer l’histoire de ce bracelet.

Rencontre exclusive avec Shinji Nakaba, dans son atelier au Japon

En 2023, le Loewe foundation Craft prize a braqué les projecteurs sur Shinji Nakaba. Mais son travail est reconnu dans le milieu du bijou...